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ثقافة Beyond the Silence d’Intissar Belaid: Tribulations d’un monde reçu en héritage

نشر في  18 جوان 2017  (14:58)

User de la rupture pour dessiner une continuité, telle a été l’approche de la réalisatrice Intissar Belaid dans son nouveau film « Beyond the Silence », présenté en avant-première le 15 juin à l’Institut Français de Tunisie. La réalisatrice tente en effet de dessiner les contours d’un rapport particulier qu’elle entretient avec son grand-père, paysan vivant au Kef. Le tout d’un rapport éclaté en morceaux disparates et raconté par bribes de visages, de conservations et de fragments d’images et de lumières. 

Intissar Belaid procède par un langage cinématographique particulier en juxtaposant deux cadrans filmiques. Celui de gauche ouvrant sur l’intérieur de la maison de son grand-père, celui de droite ouvrant sur son extérieur avec ses espaces, ses lumières et ces images restées enfouies quelque part dans la mémoire. Lui d’un côté et elle de l’autre.

Image morcelée, en état de rupture mais qui construit, paradoxalement, une sorte de globalité. En effet, tout est question d’un rapport impossible qui s’inscrit dans une continuité intrigante. Entre le grand-père et sa petite-fille, une filiation par le sang et combien de divergences! D’où ces deux cadrans qui marquent la rupture mais qui se complètent, qui s’entrecroisent au service d’une territorialité personnelle et géographique qui refuse de se détacher de son âme, de son passé.

De cette fusion de l’image, nait une image particulière. Sereine et tremblante, entière et lacunaire d’une enfance bercée par le tempérament d’un grand-père introverti et une ouverture incroyable sur l’infini. L’œil du spectateur s’y accommode. Mieux, il arrive à adopter une grille de lecture  mixte, classique d’un côté et  surréaliste  de l’autre. Des plans simples racontant la vie quotidienne du grand-père versus des plans poétiques sur un œil de chien qui s’entrouvre, sur une lumière verte-violacée fuyante, ou sur une ombre de plante qui dessine une couronne noire.

Au-delà des mots, au-delà du silence, Intissar Belaid a filmé une charge émotionnelle froide : l’introversion du grand-père et la déception de la petite-fille qui cherchait à jeter des ponts, à faire revivre un moment marquant de sa vie (quand elle lui pose la question relative à son souvenir du jour de sa naissance  et qu’il lui répond qu’on lui avait annoncé sa venue au monde, c’est tout). Mais Intissar a surtout filmé toute l’étoffe de ce monde des premières heures, un monde riche en lumières, en ombres, en espaces vides, en une nature énorme ouverte sur l’infini.  

Entre les plans de droite qui se font volatiles et ceux de gauche qui tentent de fixer des bouts de vie, la réalisatrice ne fait pas de concessions. Elle recourt à la rupture pour dire une continuité. Celle de ce tissu humain, de ce legs naturel intense. Et c’est ainsi que le film transpose les tribulations d’un monde reçu en héritage.

Chiraz Ben M’rad